Le regard vers la Pologne: un coup d’arrêt ou renouveau des relations est-européennes ?

Reporté en raison de la crise sanitaire, le premier tour tant attendu de l’élection présidentielle en Pologne s’est tenu ce dimanche dernier. À la tête du classement avec 41% des suffrages se hisse le Président sortant, Andrzej Duda du parti Droit et Justice (PiS), suivi de près par le maire de Varsovie et ancien eurodéputé, le polyglotte Rafal Trzaskowski de la Coalition civique qui rassemble pour sa part 30,4% des voix. Au carrefour entre libéralisme, conservatisme, nationalisme et européanisme, ces deux candidats sont symptomatiques des pans d’une société clivée. Une lutte pour le pouvoir de la plus haute importance, placée sous l’œil attentif de l’Union Européenne.

Marquées par une forte participation, ces élections ont suscité un vif engouement à l’échelle nationale mais également continentale. En effet, depuis plusieurs années, le gouvernement polonais s’est vu reproché de durcir sa position : oppression des minorités, atteintes à la séparation des pouvoirs, etc. Une attitude qui déplait tout particulièrement à Bruxelles qui y voit une entrave aux valeurs fondamentales de démocratie, de respect des droits de l’Homme et de l’Etat de droit – pourtant nécessaires à l’adhésion. 

C’est pourquoi le 20 décembre 2017, après plusieurs mois de mise en garde, la Commission initie contre ce même pays la procédure dite « de l’article 7 » du Traité sur le Fonctionnement de l’Union Européenne (TFUE). Pour rappel, celle-ci donne la possibilité à l’Union et ses institutions de sanctionner politiquement un Etat membre qui ne respecterait pas le patrimoine constitutionnel commun. En l’espèce, l’exécutif européen reprochait à la Pologne ses réformes judiciaires dont découlent « unrisque clair de violation grave de l’Etat de droit ». Conformément à ce mécanisme graduel, lorsqu’aucune amélioration n’est constatée, il est possible non plus de prévenir – comme ce fut le cas ici – mais de sanctionner la violation, si tant est qu’elle soit « grave et persistante ». Une telle décision reviendra toutefois au Conseil Européen qui, s’il se prononce à l’unanimité -1, pourra choisir de suspendre les droits de l’Etat concerné. 

Pour toutes ces raisons, la potentielle passation du pouvoir en Pologne est vue pour beaucoup comme une occasion unique de court-circuiter des projets de loi dénoncés et, a fortiori, de réparer les liens avec Bruxelles. Nonobstant les résultats du deuxième tour, ils façonneront inévitablement les futures relations du pays avec l’UE. La réelle question est : dans quel sens ? Marqueront-ils le début d’un renforcement ou d’un affaiblissement de celles-ci ? La réponse le 12 juillet 2020.

Manon DESCAMPS