Mercredi 15 juillet, Claire Hédon a été nommée Défenseure des droits. Elle succèdera à Jacques Toubon à la fin du mois de juillet. C’est l’occasion de se pencher sur cette institution souvent méconnue mais indispensable au respect des droits et libertés en France.
Crée en 2011 et entièrement indépendant de l’État, le Défenseur des droits est né de la réunion de quatre institutions : le Médiateur de la République, le Défenseur des enfants, la Haute Autorité de Lutte contre les Discriminations et pour l’Égalité ainsi que la Commission Nationale de Déontologie de la Sécurité. Il s’agit d’un concept inspiré de la figure d’Ombudsman suédois, qui a pour mission de s’assurer que les individus privés de liberté ne soient pas exposés à des sanctions ou des traitements dégradants. Il s’est développé de manière considérable depuis son origine. L’Union Européenne a encouragé les États-membres à se doter d’une institution similaire. Claudia Monti occupe ainsi ces fonctions au Luxembourg, de même que Catherine de Bruecker et David Baele en Belgique. Les cantons et communes suisses se sont également dotés d’instances jouant le rôle d’ombudsperson.
En France, le Défenseur des droits est nommé par le Président de la République pour un mandat de 6 ans et a de nombreuses missions: l’amélioration des relations entre les usagers et les services publics, la lutte contre toute forme de discrimination ou encore la protection des droits de l’enfant et des défenseurs d’alerte. Il peut également émettre des avis et recommandations en relation avec la déontologie des forces de l’ordre. Il n’y a qu’un seul défenseur des droits en France mais celui-ci nomme de nombreux délégués partout sur le territoire, qui font office d’intermédiaire entre les citoyens et lui. Toute personne physique ou morale peut le saisir directement et gratuitement. Il peut être saisi par voie postale, auprès de l’un de ses délégués, mais également en ligne, en remplissant un formulaire prévu à cet effet sur le site du Défenseur des droits.
Celui-ci dispose d’un pouvoir de recommandation en vue de garantir le respect des droits et libertés de la personne s’estimant lésée. Si un enfant étranger ou handicapé a des difficultés pour accéder à l’école par exemple, la famille peut saisir le défenseur des droits. Si un agent du service public fait usage de la force de manière disproportionnée, il peut également être saisi.
Cette institution, désormais inscrite dans la Constitution, reste critiquée par son manque de possibilité d’actions. En effet, le Défenseur des droits possède des larges pouvoirs d’investigation et d’enquête mais ne peut émettre que des recommandations à l’égard des personnes mises en causes. Il peut demander à l’autorité qui en a le pouvoir que des sanctions disciplinaires soient prises mais ne possède pas de pouvoirs contraignants.
Jacques Toubon, ancien ministre de la justice, était le Défenseur des droits depuis le 17 juillet 2014, ayant pris la succession de Dominique Baudis, décédé en fonction. Son mandat a été l’occasion pour lui de dénoncer l’utilisation des lanceurs de balle de défense (LBD) et la fréquence des contrôles au faciès en France. Il a ainsi fait face à 780 000 demandes d’intervention ou de conseil. Les principales causes de discriminations rencontrées avaient à trait à l’origine du demandeur, son âge, sa santé ou la présence d’un handicap physique ou mental.
Jacques Toubon a émis des critiques sévères sur le mauvais accueil des mineurs étrangers et sur la gestion des camps de migrants. Il a également reproché à la France la transcription d’une partie de l’état d’urgence dans la loi après les attentats de 2017.
A la veille de son départ, le Défenseur des droits a renouvelé ses recommandations pour que le maintien de l’ordre soit exercé dans le respect de la déontologie des forces de police. Dans son rapport, il préconise la fin de la technique de l’encagement, utilisé par les forces de police lors d’interpellations. Il alerte d’ailleurs sur les conséquences des interpellations préventives, notamment lors des manifestations, qui aboutissent souvent à des mesures privatives de liberté disproportionnées. Enfin, Jacques Toubon se dit en faveur de mesures pour garantir l’identification des forces de l’ordre sur la voie publique. Ces préconisations seront au cœur de la nouvelle mission de Claire Hédon.
Claire François