Que se passe-t-il au Bélarus?

Le dimanche 9 aout 2020, en Bélarus, ont eu lieu les élections présidentielles. Suite à celles-ci, Alexandre Loukachenko a été réélu pour la 6ème fois, avec 80% des voix, contre la candidate Svetlana Tsikhanovskaia. Cette élection entraîne une révolte du peuple, un peuple ayant la conviction que les résultats soumis ont été falsifiés. 

Ce pays est très souvent désigné comme la « dernière dictature européenne » et il est le seul pays du continent à ne pas être membre du Conseil de l’Europe : son adhésion n’est pas envisagée puisqu’il ne respecte pas les trois piliers que sont la démocratie, l’État de droit et les droits de l’Homme. En particulier, il est le seul pays européen à ne pas avoir aboli – ou cessé d’utiliser – la peine de mort et à avoir procédé à des exécutions au 21ème siècle.

Indépendant depuis 1991, le Bélarus traverse des années sombres avec un désordre politique profond, une hausse de la criminalité, et plus aucune organisation d’État. C’est dans ce cadre profondément meurtri qu’Alexandre Loukachenko arrive au pouvoir avec 90 % des voix en 1994. Il met alors en place un régime autoritaire avec un parti politique unique, aucune opposition n’est acceptée, la liberté d’expression est limitée et la séparation des pouvoirs n’est pas assurée. 

Plusieurs oppositions à ce régime se sont manifestées, notamment en 1999 avec différents opposants parmi lesquelles des personnes haut placées, dont des proches du Président, qui ont subi la répression d’État, celles-ci seront désignées comme les « disparus de Biélorussie ». Un peu plus tard, en 2010 lors d’une nouvelle élection présidentielle, l’opposition démocratique parvient, enfin, à avoir plusieurs candidats dans la course aux présidentielles. Un espoir né dans cette « dictature ordinaire », un espoir qui ne fera pas long feu après un résultat de plus de 80% des voix en faveur du Président Loukachenko. La colère du peuple explose, en raison des soupçons de détournement des urnes, laissant place à de nombreuses manifestations dans les mois qui suivent. Plus de 700 personnes sont emprisonnées, ainsi que tous les candidats qui s’étaient présentés contre le Président.

Le président bélarusse est réélu avec 89% des voix en octobre 2015, dans le silence de la communauté internationale, alors même qu’aucun candidat de l’opposition n’avait pu se présenter. 

L’histoire semble cependant avoir rendez-vous en cette année 2020 : de nombreux témoignages font état de dysfonctionnements importants lors des élections du 9 août dernier. Cette fois-ci, la révolte populaire semble être un début de révolution :  depuis des jours, les manifestants réclament une nouvelle élection présidentielle, la fin de la répression, l’arrestation et le déferrement des cadres de celle-ci et la libération des prisonniers politiques. Le soutien international aux manifestants est aussi plus affirmé que par le passé : l’Union européenne envisage l’adoption de sanctions à l’encontre de Minsk bien que la Russie en reste l’alliée. 

Lors d’un sommet extraordinaire le 19 août 2020, l’Union européenne affirme ne pas reconnaître le résultat de l’élection présidentielle, soutenant ainsi « le droit du peuple bélarusse à déterminer son propre destin ». 

Le devenir du Bélarus semble prendre un tournant décisif durant ce mois d’août 2020. Va-t-on assister à un changement de système politique en faveur de la démocratie, de l’État de droit et des droits de l’Homme ?  

Siwar Ben Rejeb